[Recueils Caverneux] "Crémaillère Improvisée, ou ‘Récit d'une fête un peu trop enflammée’ " par le Teuträm le cynique
Il est des
histoires dans ce Hall qui ne méritent pas d’être contées. Il en est par contre
qui le méritent. Celle que je vais vous conter n’est pas un mythe ou une légende
–du moins pas encore-, mais elle recèle tous les éléments qui font d’elle une
bonne histoire. Sa particularité est que ceux qui l’ont vécu ne voient pas l’intérêt
de la raconter. Peut
être blasé ou simplement prompt à oublier les choses du Hall. Et il faut les
comprendre : leur quotidien était façonné par ce genre d’histoires. Alors
forcément, ils préféraient les garder pour eux pour ne pas lasser le public.
Seulement, nous
ferons une exception cette fois ci.
L’histoire
commence donc il y a 6 cycles et ... non ! Dans
un souci de lisibilité, je vais restreindre le récit à ces derniers jours et à
l’organisation de cette pendaison de crémaillère dont l’organisateur ne savait même
pas qu’il allait l’organiser avant d’arriver sur les lieux et dont les participants
s’étaient invités sans autorisation. Et la conclusion de celle ci fut pour le
moins surprenante.
Donc…l’histoire
commence il y a quelques jours. Un troll du nom de Mororats, Tomawak-Trollonisateur
de son état, était en plein cœur d’une aventure palpitante et pour le moins
agitée. Voir compliquée. En effet, il poursuivait un autre Tomawak, qui lui
aussi le poursuivait. Je vous avais prévenu : agitée et compliquée. Des
traqueurs qui traquaient d’autres traqueurs, réciproquement. Bref…Mororats,
donc, poursuivait ce troll jusqu’à ce que celui-ci disparaisse dans une sorte
de vortex obscur et visqueux. Typique des adorateurs du Sombre ! Le
Trollonisateur hésita t-il à passer le portail ? L’histoire ne le raconte
pas. Ce qu’elle dit par contre, c’est qu’il franchit tout de même les flux de
téléportation. Quelle ne fut pas
sa surprise lorsqu’il découvrit qu’il se trouvait en plein milieu d’un village.
« Eurk ! » pensa t-il, « des villages, et toutes ces
tanières attachées les unes aux autres, accrochées au Hall…et le tout construit
par des Trolls ! ». L’idée l’écoeurait.
Ce qu’il faut
dire sur Mororats, c’est qu’il était de ces trolls dont le concept de
sédentarisation était une aberration. Les choses stables, équilibrées, sécurisées,
manquaient cruellement de mouvement. Quelque soit les trolls, les clans, les
religions, tous à ses yeux « étaient enchainés » à cette vie sans
surprise. Et il se plaisait à penser qu’il était une secousse qui entrait dans
la vie des autres, pour les réveiller, pour les mettre en mouvement. Sa seule
présence suffisait à cela. En réalité, il s’imaginait
même être un tremblement de terre. Laissons lui le plaisir de cette pensée.
Revenons donc à
notre histoire. Mororats cherchait Ann Pet Troll –puisque c’était son nom- sauf
qu’il avait devant lui une quantité incroyable de silhouettes, toutes plus
hostiles les unes que les autres. Sa présence n’était pas la bienvenue. En fait,
il existait peu d’endroit dans le Hall où cela aurait été l’inverse. Peu
importe. Il était seul mais il assumait ses choix et le danger dans lequel il s’était
fourré « tout seul comme un grand ». Alors il fit un pas en avant,
déterminé à retrouver sa traqueuse et ses compères, jusqu’à ce qu’une idée
vienne éclabousser son esprit : « Bordel !!
Mais je pense comme un kastar là !! SORS DE MA TÊTE TEUTRÄM !!! »
hurla t-il intérieurement, comme si ses racines tomawaks venaient de ressurgir.
Il était fier de sa race. Et il savait qu’il valait mieux que ça.
Il s’arrêta alors
là où il était pour constater que le village n’était pas seulement devant lui…mais
tout autour de lui. Il était DANS le village de la Sombre Alliance. Un coup d’œil rapide lui permit
de se rendre compte qu’il était déjà encerclé. Alors à quoi bon jouer au kastar ?
Il fallait agir avec classe ! Surtout surprendre les agresseurs ! Ce
qui était une technique propre au Tomawak –et que nombreux de kastars leur
enviaient au point de s’ouvrir les veines si on leur disait que ça leur permettrait
de les rendre invisible-. Et ce qui suivit les surprit effectivement.
Près de Mororats
se trouvaient deux bâtisses. Des tanières fraichement bâties et sans allure. Ni
une ni deux, il entra dans la plus grande. « Hey ! »
fit une voix à l’intérieur. Un troll était en train de balayer les lieux. Pas
le temps de se battre, le Tomawak choisit une option plus rapide : il
déposa une bourse bien grasse et remplie de Gigots de gobs. De l’argent qu’il
avait ramassé sur les dépouilles de certains habitants de ce même village. Ironique
non ? Mais une fois que l’on savait ce qui enchaînait le cœur des trolls,
il n’était point difficile de jouer avec eux. Et effectivement le troll s’empara
du sac et quitta le balai et les lieux sur le champ.
Mororats prenait
possession des lieux. Il s’approcha de la cheminée rustique qui avait été
installée puis l’alluma en se servant de sa magie de feu. Les flammes étaient
réelles et dévorèrent le foyer ardemment. Il y plongea plusieurs torches et
sortit les planter tout autour de la tanière. Le message était clair : « Je
suis chez MOI ! vous êtes prévenu ! ». Il utilisait le concept
de « propriété » si chers aux trolls sédentaires, pour gagner un peu
de temps. Pour quoi faire ? Est-ce que cela en valait la peine ? Il
était certain qu’il n’y avait pas troll plus incompatible avec ces principes de
propriété que Mororats. Seulement lorsqu’il était l’heure d’agir, aucun doute
ne pouvait être un obstacle.
Sa manœuvre avait
fonctionné. Le village sortait de sa torpeur peu à peu et cette pendaison de
crémaillère s’annonçait fumante. Mororats s’était mis sur le palier et
attendait les invités.
Et ils
arrivèrent.
L’énergie
affluait autour du Tomawak lorsqu’une main tendue lança un sortilège sur lui. Ses
jambes tremblèrent un instant. Alors qu’il se rendait compte d’être sous l’effet
d’un hypnotisme, il vit un énorme kastar foncer sur lui sans sommation. Sans
doute celui-ci voulait participer à tout prix à cette crémaillère. Sous l’impact,
Mororats recula de plusieurs mètres en arrière jusqu’à se retrouver à l’intérieur
de la tanière, mais ne tomba pas. Il avait encaissé le coup sans frémir et son
regard se fit plus sévère, bien que ses lèvres camouflaient un sourire de
satisfaction. La fête commençait et promettait d’être longue.
« VOISINS !
ICI C’EST CHEZ MOI DESORMAIS!!! JE VAIS VOUS FAIRE AIMER VOTRE VILLAGE
COMME JAMAIS !!! VOUS AUREZ TOUS DROITS DE BOIRE DE LA THORINE CE SOIR ! »
hurla t-il à voix haute cette fois ci. Sa voix avait résonné dans les cavernes
alentours. Tous étaient désormais au courant de sa présence. Un tas de
silhouettes affluèrent autour de la tanière et certaines entrèrent. Malgré les
torches et la cheminée, la luminosité ne suffisait pas à révéler tous les
individus présents dans la
pièce. C’est à ce moment là qu’il y a eut un :
BOOOOMMMM !!!
Mororats n’avait
toujours pas bougé. Derrière, plusieurs durakuirs l’agrippèrent alors et
tentèrent de lui faire perdre l’équilibre. Mais en vain. Des flux psychiques
parcouraient les murs dans tous les sens et agressèrent le Trollonisateur. Ces
attaques blessaient les trolls de l’intérieur et elles l’affaiblirent un
instant.
L’initiative
pourtant venait de passer entre ses mains. Il savait qu’il ne pourrait pas
rester là indéfiniment à survivre à ces rafales de magie. Alors, comme
toujours, il n’hésita pas une seule seconde : il joignit les mains puis
ferma les yeux. L’énergie se concentra et un flash intense se libéra de son
corps. Tous les invités furent éblouis.
Et les sombres
villageois reprirent à nouveau les commandes. Encore un hypnotisme, moins
puissant, puis plusieurs kastars qui s’élancèrent sortant des ombres comme des fantômes
cachés dans le grenier. Pourtant les morsures et les coups ne perçaient pas la
peau dure de Mororats. Seules les rafales parvenaient à l’atteindre. De temps à
autres, un grand ‘BOOOOOOMMM !!!’ se faisait entendre. Si l’on mêlait
à cela les perturbations provoquées par la magie psychique des durakuirs, la
tête du Tomawak résonnait comme une cloche dans le sanctuaire du Froid.
Et cela n’était
pas pour lui donner moins d’idées. Au contraire. Cela lui donnait envie de
faire un peu plus de spectacle. Mais il était seul, il ne pouvait mieux pour le
moment. C’est alors qu’une question le frappa (plus fort que tous les autres
coups qu’il avait reçu) : « Où sont les autres ??? Ils devaient
apporter la THORine et si ça continue la fête sera finie et aucun invité n’aura
eu sa dose ! ». Le ‘grrrrr’ caractéristique des kastars sortit
naturellement de sa bouche. Il ne pouvait retenir certaines affinités avec cette race.
Il fallait gagner
du temps ! Alors Mororats sauta par la fenêtre et grimpa une légère pente
qui menait juste au dessus de la tanière, une torche à la main, comme pour qu’on
ne le perde pas de vue. Au loin dans la foule, il put remarquer la présence d’un
kastar encore plus énorme que les autres. Un Tachamouche dont il est inutile de
dire le nom. Et celui là aurait détruit la magie du Tomawak en quelques
morsures. Ce n’était pas un mal que de le voir hors de portée.
Trop surpris par
le déroulement de la crémaillère, les invités mirent du temps à se rendre
compte que le propriétaire n’était plus là. Un seul d’entre eux avait suivi le
Trollonisateur et l’avait frappé violemment, lui faisant mettre genoux à terre.
Mais Mororats se releva à nouveau et fonça dans une caverne voisine, d’où il
pouvait voir le toit de sa tanière. La suite ne serait qu’une question de
minutes, car déjà d’autres durakuirs s’approchaient. Et les assauts reprirent
de plus belles.
Le Trollonisateur
était acculé.
C’est à ce moment
là qu’une voix familière lui fit dans l’ombre « On arrive pas trop tard ? ».
Un autre Tomawak. En fait, plusieurs tomawaks se trouvaient là dans les ombres,
prêts pour la conclusion de cette crémaillère. Le clou du spectacle.
Plusieurs
tonneaux avaient été apporté jusque là, à travers des tas de portails. Leur
histoire même mériterait un livre. Mais ce n’est pas là le sujet. Mororats et
les autres les prirent et retournèrent à la fête, camouflées qu’ils étaient.
« THORine
POUR TOUT LE MONDE !! » fit il en vidant les tonneaux dans toute la
pièce.
Il eut alors une
pensée pour Teuträm : « le Feu Sacré est nous ! Le Feu Sacré est
en nous…le Feu Sacré c’est NOUS ! »
Et en même temps
qu’il réfléchissait, des flammes l’entourèrent. Mais elles ne le brulèrent pas,
pourtant la tanière semblait prendre Feu et les invités commencèrent à sortir.
Ils purent voir autour du Trollonisateur, les silhouettes de Ptitbillou –qu’ils
connaissaient très bien-, mais aussi celui de Flash et de Cicatrace –qui n’était
pas le moins connu de tous, au contraire-. Quatre Tomawaks, pour une
crémaillère un peu particulière.
Une crémaillère
ou le propriétaire venait de mettre le feu à sa propre tanière. Qu’est ce que
cela voulait dire ? Et quelle était cette énergie qui émanait du Feu ?
Qui pouvait le dire ? Cela aussi ferait l’objet d’une autre histoire.
L’important était
de savoir que Mororats avait survécu à tout cela. Disparaissant dans les
flammes avec ses compagnons et laissant un message clair à ce village. Et à
tous les villages du Hall. Dans la foule assistant à la scène, on voyait des
visages telle que celui de Maluje, ou encore de Sir Özkrönik. Tous ces trolls
avaient choisi leur lien, leur tanière, leur Dieu. Ils y étaient enchainés et
ils l’assumaient. Mais tout cela ne les laissait pas indifférents.
Avant de partir,
Flash se tourna et lança un projectile magique dans la foule, comme pour
conclure sur une note hostile. Le mot de la fin, qui en annonçait bien d’autres…
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